C'était un géant gigantesque, aussi long qu'un jour sans pain et aussi épais qu'une tour de moulin. Il habitait sur les côtes d'Alger mais ses relations avec les pêcheurs et les marins se sont aggravées. Tout le monde lui parlait avec éloge d'une île au milieu de la mer appelée Majorque. Ils disaient que là-bas, les plages étaient enchanteresses, les eaux cristallines et le sable doré. Que les montagnes s’élevaient vers le ciel et que mille oiseaux chantaient parmi les roseaux des lagunes. C'est pourquoi le géant voulut y aller. Avec un sac de terre sur l'épaule, une poignée de graines de basilic dans sa poche et un long baton au poing, il avait hâte d'embarquer. Mais il ne rentrait dans aucun bateau, ni assis ni debout. Un skipper intelligent a pensé qu'avec deux bateaux, si le géant mettait un pied à l'intérieur de chacun, ils pourraient l’embarquer. Et c'est ce qu'ils ont fait. Les deux bateaux traversèrent la Méditerranée, parallèlement comme des voies ferrées. Mais lorsqu’ils arrivèrent devant Cabrera, la trajectoire des bateaux changea : un partit à droite, l'autre à gauche. Le géant dut s'élargir, s’élargir, et plus encore... Il s’élargissait tellement que de peur de tomber il se pencha en tapant son bâton sur le sol majorquin et le panier se renversa. Toute la terre qui en tomba a formé le Puig de Randa ; où le baton a été planté, le puits de Cala Pi a été fait ; et là où la sueur du géant s'est répandue, la Font de la Vila se mit à couler, et coule toujours. Et qui n'y croit pas, allez le chercher !